Rencontre avec Mr. le colonel, fils de Mimi

dimanche 18 janvier 2009, par Leonor

On ne vit pas au même rythme. Le temps. Se ralentir. On ne va pas à la même vitesse. Ça patine. Ça avance doucement. Heureusement.
On a du mal à se mettre à ce rythme lent de la personne. Quand on marche, quand je fais les magasins avec elle. On se fatigue à faire toute doucement ! Il faut attendre la parole. Personne n’est à ce rythme-là !

Ils sont assis, ils attendent. Tout doucement, elle avance le déambulateur et elle avance… Pour communiquer il faut se mettre à leur vitesse, leur rythme de vie…

Vous avez des enfants ? Ça bouge trop ! Ils ont des jours avec et des jours sans. Le mois de mai, ça n’a pas été un mois terrible !
Elle avait toute sa tête ! Elle avait des souvenirs très précis. Il y a des moments comme ça… C’était le moment des mots croisés. Il fallait pas venir à certains moments ! Ils ont leur rythme. Sa joie c’est sa petite cigarette !

Ils attendent. Quand il ne reste plus rien, ils attendent. C’est peut-être leur force et à la fois, c’est notre désespoir. Nous on n’attend pas. Et puis, quand je vois ma mère, quand elle me voit, elle m’attendait. Et les autres sont sur leur chaise. Je ne sais ce qu’ils attendent, mais ils attendent. Ils sont patients ! Comme s’ils avaient encore des années et des année ! Le tout petit : saute, court. Eux ils ont trouvé le temps. Nous on a encore des choses à apprendre. Nous on ne nous a pas appris le temps ! Quand on souffle, on peut pas s’arrêter longtemps. Ma mère me dit : « Tu t’en vas déjà ? Ah oui, tu dois avoir du travail. Maintenant je n’ai plus que des occupations. » Mais elle ne comprend pas. Quand je suis avec elle, elle ne parle pas… Il y a des choses que l’on comprend sans parler. On fait quelques pas ensemble.

On s’occupe de ses anciens comme on s’occupe de ses enfants. On fait attention… On essaie de leur apprendre les petits pièges de la vie… Avec eux, on anticipe : le sol n’est pas droit, une petite marche… C’est sur la force d’attention que l’on devient la mère de la mère du père…

Il y a des choses qu’elle ne dit plus. Je sais qu’elle s’appauvrit. C’est moins qu’avant… Quand on approche du terme de la vie, qu’il y a la maladie, il y a l’émotion, mais il y a des aspects qui se sont appauvris. La fleur… On passerait de la fleur au souvenir de la fleur ! L’idée qu’on se fait de la fleur. On la voit toujours mais c’est moins net. On va garder un souvenir de souvenir. On se souvient par du détail de la chronologie de la suite on a un flash, une impression, un peu comme une émotion des souvenirs… Bon il y a des fleurs qui sèchent et qui se sont arrêtées. La fleur est sèche mais elle est vivante. C’est peut-être ça…

Si on va les voir trop souvent, ils ne font plus rien, ils t’attendent ! C’est volontairement que je viens moins souvent, pour qu’elle vive normalement et moi aussi… C’est comme les enfants… qu’on leur laisse un petit peu d’autonomie. Il faut qu’on vive !

Il faut conserver toujours cette petite porte. Un moment à soi.


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